Comme certains l'ont remarqué, je n'ai pu tenir cette chronique dans le précédent bulletin. En effet, je suis parti un mois en visite d'inspection à l'île Aipula, pour le compte de l'IARU. Le but était l'éventuelle homologation pour le IOTA.

Située au nord-est de la Papousie, cette ancienne colonie du Gratémoila et du Chakistan est indépendante depuis 1981. La particularité géographique de cette île : c'est la seule au monde qui est plus large que longue ! La capitale Cépala, coincée entre la côte de Maille et le plateau d'Abasourdie, est traversée par le fleuve Noir. Elle regroupe près des deux tiers de la population.

Les principales ressources viennent de la culture du charivari et du tohu-bohu, de l'exploitation des mines de crayons et des tréfileries de lignes de mire.

Mais abordons maintenant le domaine du radioamateurisme. Ils sont près de cinq cents OMs dépendants directement du ministère des bons points et des poignées de mains. Huit classes ou degrés sont instaurés. La première étant accessible sans examen, les suivantes par ancienneté et mérites. Le président de la république Benoît de Montochèque, lui même radioamateur encourage très fortement la pratique de ce loisir.

La technique en est encore aux balbutiements, seulement deux modes de trafic sont exploités : la phonie en ondes acoustiques avec relais à porte-voix et la télégraphie optique. Ces techniques ne permettent pas de mirobolants DX. De grands espoirs sont néanmoins permis grâce aux récents émetteurs à Poltron, ouvrant ainsi la voie des bandes kilométriques.

Les radioamateurs se battent actuellement pour l'abrogation de la très contraignante loi des antennes escamotables. Afin de nuire le moins possible aux vols des chauves-souris (espèce très protégée dans l’île), toute antenne ne peut affleurer de la toiture dès le coucher du soleil. On imagine quelle ingéniosité il faut déployer dans la construction de dispositifs aussi discrets qu'efficaces.

Lors des diverses réunions entre les représentants de l’administration, les radio-clubs et notre délégation, il apparut bien vite de nombreuses divergences. Mais grâce à la bienveillante intervention de monsieur le président de la république, la majorité des problèmes était réglée . Faut-il préciser que c’est à la suite de 17 jours et 3 nuits de palabres souvent houleuses et quelquefois au bord du pugilat, que nous sommes arrivés à ce résultat. Malheureusement il restait un point important qui n’était toujours pas résolu à l’heure où je rédigeais ce rapport. Ce grain de sable, ce “ détail ” le voici :

les radioamateurs Aipulaciens trafiquent en télégraphie selon le code morse *. Une particularité cependant les différencie des usages admis par la presque totalité du monde radioamateur, le trait dure non pas trois points mais trois points et demi ! Cela peut sembler anodin à certains OMs peu au fait de la chose, mais pour d’autres, c’est tout simplement scandaleux et inadmissible. Je ne trancherai pas cette situation assez épineuse, n’ayant pas toutes les pièces à disposition lors de la discussion (de plus ,je n’emploie plus la pioche depuis des lustres...hélas !). Il est probable que ce refus de revoir leur réglementation fasse capoter l’ambitieux projet mis en place par une poignée de radioamateurs aussi compétents que désintéressés (donc de bonne volonté, comme il est courant de dire).

Ici comme ailleurs, tous les gars du monde savent parfois ne pas se donner la main. Avec des attitudes bornées et des comportements imbéciles, ils compromettent gravement un fabuleux loisir.

Gageons que l'affaire aille dans la bonne voie. N’oublions pas que le marché juteux des communications de loisirs, intéresse beaucoup d'importateurs de matériel radio. Il serait dommage que des mesures de rétorsion pénalisent les OMs locaux. Que deviendrait cette fragile économie si brutalement on cessait la livraison des moule à gaufres, des barreaux de chaises ou des niveaux à bulle dont l'île a grand besoin ?

* Sur l’île voisine de Gouniaffe, le problème semble encore plus épineux. La télégraphie ici se distingue par une totale opposition avec les usages maintenant bien établis.

Ce sont trois signes qui sont employés :

le point, le demi-trait (égal à 2 points) et le trait (égal à 4 points). Cela permet en principe une grande variété de caractères et symboles (plus de 450 répertoriés !), mais il faut dans ce cas une oreille bien entraînée et une mémoire d'éléphant.

Mais lors de mes périples lointains, j’ai encore découvert bien d’autres sujets d’étonnement. Si on me laisse un peu de place, dans les prochains numéros, je vous les narrerai avec joie.

Bien des choses au QRA.